Vous voulez tout savoir sur les épées en aluminium ? Alors vous êtes au bon endroit ! Et si après la lecture de cet article vous avez encore des questions, n'hésitez pas à décrocher le téléphone, nous serons à l'autre bout pour répondre à vos interrogations (et dernières réticences) !
Un peu d'histoire
Certains vous diront que les épées en aluminium sont une « mode » récente, des joujoux high-tech, développés par une société très « corporate »… (on préfère taire les noms). En vérité, les lames en aluminium sont utilisées depuis plus de 50 ans au cinéma et par les professionnels de la cascade ou du spectacle vivant.
L'exemple le plus ancien d'utilisation d'armes en aluminium que nous puissions dater est le film « Le Miracle des loups » d’André Hunebelle, sorti en 1961. Pour faciliter le travail des comédiens et des cascadeurs, en particulier lors de cette scène de duel avec d'immenses épées médiévales, le régleur de combats à opter pour des épées en aluminium.
À cette époque, la fabrication d'épées en duraluminium reste marginale et exclusivement réservée aux professionnels du cinéma ou du cabaret, comme au Lido par exemple. Qui ont été les premiers fabricants d'épées en aluminium dural ? Difficile à dire... Les sociétés Bapty & Co et Maratier semblent être les plus anciennes à proposer ce type d'épée à la location.
Alu, duralu, duralumin : sacrée pagaille lexicale !
C'est bien connu, les cascadeurs adorent jargonner : "t'es en carafe vieux", "tu vas servir la soupe au comédien",... Les épées se voient donc affublées de pleins de petits qualificatifs, tant et si bien qu'il est parfois difficile de s'y retrouver.
Pour faire simple :
"Épées en aluminium" : appellation générique, qui peut aussi bien désigner des épées en aluminium aptes au combat que des épées en aluminium de décoration. Attention donc !
"Épées en duraluminium" : c'est le terme pour désigner spécifiquement les épées fabriquées dans un aluminium solide et résistant, le duraluminium, aptes aux séquences de combats.
Le terme "duraluminium" est parfois remplacé par ses diminutifs tels que "dural", "duralu" "duralumin". En anglais, le terme consacré est "aircraft aluminium".
Dites Professeur, y'a quoi dans votre dural ?
Le duraluminium, est un alliage à base d'aluminium, de cuivre, de magnésium et de manganèse. Après traitement thermique, une réaction entre l’aluminum et le magnésium provoque une augmentation de la dureté et de la résistance à la traction. Sa légèreté ainsi que d’autres propriétés physiques font qu’il est largement utilisé dans l'industrie aéronautique depuis les années 1920. Auprès de l'AFNOR (Agence Française de Normalisation), le duraluminium a pour nom de code 2017A, ou anciennement AU4G.
Depuis leur invention, les épées de cinéma en aluminium sont fabriquées en AU4G. Aujourd'hui encore, la quasi totalité des armes blanches de cinéma sont réalisées en AU4G. Certains armuriers américains préfèrent le titane et nous, chez Armes Garcia, nous avons l'AG8000®, notre propre alliage d'aluminium, que nous avons développé nous mêmes, comme des grands, et qui est conçu spécifiquement pour l'escrime artistique, de cinéma et la cascade.
Nous avons enrichi notre alliage en magnésium et en titane. Vous voyez l'effet que cela vous fait lorsque vous prenez des vitamines ? C'est pareil pour les métaux ! Grâce au boost en magnésium et à l'enrichissement en titane, notre AG8000® est plus résistant et vieilli mieux que l'AU4G, tout en conservant les mêmes propriétés de brillance, de légèreté et de son.
Si vous souhaitez travailler avec des épées en AG8000®, découvrez la gamme CinéLames©.
Pourquoi des épées en duraluminium ?
Ça c'est LA grande question ! Avant toute chose, il est nécessaire de rappeler que les épées en aluminium ont été conçues spécifiquement pour l'escrime au cinéma. C'est pourquoi il est impératif de se replacer dans un contexte de travail avec une caméra pour comprendre pleinement l’intérêt de ce type de matériel. Bon nombre des avantages des épées en duraluminium restent exploitables en spectacle vivant, mais c'est au cinéma qu'elles révèlent tout leur potentiel.
Le triptyque poids/dimension/dangerosité
Les épées en aluminium sont légères. C'est vrai ; mais cet argument, seul, ne suffit pas. En effet, une lame en aluminium n'est pas plus légère qu'une lame mousquetaire en acier. En revanche, le duraluminium optimise les trois composantes du triptyque poids/dimension/dangerosité.
Les lames en duraluminium peuvent être larges tout en restant très légères. Ainsi, on renforce leur impact visuel tout en conservant un poids convenable pour les comédiens et les cascadeurs. Nos lames mousquetaires en aluminium paraissent beaucoup plus impressionnantes et dangereuses que leurs cousines en acier, alors qu'elles ont sensiblement le même poids.
Le son des lames
Au fil des années, l'imaginaire collectif s'est construit, alimenté par le cinéma, la littérature ou le théâtre, tant et si bien qu'il sert aujourd'hui de jalons. C'est cet imaginaire qui, inconsciemment, crée les attentes du public : attentes en termes de chorégraphies de combat (ça c'est le job du régleur !) mais aussi attentes au niveau des épées (là ça nous concerne).
Ainsi, les épées de cinéma doivent être dotées d'un tintement de lame puissant et cristallin, que l'on nomme dans notre jargon "le diapason" de l'épée. Pour ce faire, nos épées de cinéma possèdent un diapason à l’intérieur de la poignée, dont il est possible de modifier le serrage afin d'augmenter ou de diminuer le son de l'arme.
Dans un contexte de diminution des temps de tournage et des budgets, un beau bruit (une mélodie serait plus exacte) de lames qui s'entrechoquent au plateau fait gagner un temps précieux lors du montage et de la post production, en évitant de re-bruiter complétement une scène de duel.
La vidéo ci- contre vous permet d'apprécier la sonorité des épées de cinéma en duraluminium.
Ce reportage est issu du making-of de la série "Nicolas le Floc'h". Les épées qui y sont présentées proviennent du stock de location de la société Maratier.
Optique
"L’œil de la caméra n'est pas l’œil humain", tout chef opérateur vous le dira. Aussi, il est impossible de comprendre parfaitement l'utilité d'une épée de cinéma en aluminium sans s'intéresser à l'optique et au procédé cinématographique.
"Alfred, on reste au 50 ou on passe au 85mm ? Et toujours à 2.8 ?" Ça, c'est le chef opérateur qui demande au réalisateur quelle focale et quelle ouverture il souhaite utiliser pour filmer le duel entre D'Artagnan et Jussac. Deux paramètres qui imposent le recours à des épées en aluminium, et voici pourquoi.
La focale, ou distance focale, correspond à la distance qu’il y a entre le capteur et le centre optique. Globalement, la focale a une incidence sur l'angle de la prise de vue. Plus la focale est grande, plus votre sujet semblera proche, et inversement.
L'ouverture, quant à elle, désigne la quantité de lumière que votre objectif laisse rentrer dans l’appareil grâce à un système de diaphragme. Au cinéma, l'effet Bokeh est souvent recherché car c'est lui qui donne la "patte" cinématographique à un film. L'effet Bokeh est défini comme la qualité artistique ou esthétique d’un flou des éléments défocalisés sur une prise de vue. Pour l'obtenir, il faut travailler à grande ouverture.
Nous en resterons là pour les cours de cinéma, mais ce qu'il faut retenir c'est qu'une épée peut potentiellement être filmée de très loin ou être floue dans un film. Malgré tout, le spectateur doit comprendre qu'il s'agit d'une épée, en distinguant bien sa lame. C'est pourquoi nous avons besoin de fabriquer des armes plus larges (mais pas lourdes) et extrêmement brillantes : seul l'aluminium peut alors satisfaire ces exigences !
Raccords & entretien
Une épée de cinéma en duraluminium reste avant tout, comme son nom l'indique... une épée de cinéma. Par conséquent, elle est amenée à jouer sur plusieurs scènes et parfois dans des situations différentes. Sa lame a parfois besoin d'être changée selon les demandes de la mise en scène. Si une lame en dural est montée sur la garde pour des scènes de combat, une lame en latex peut s'avérer nécessaire pour une cascade, mais on peut aussi recourir à une lame en balsa pour un effet de casse, ou alors on peut avoir besoin d'une lame en acier pour des plans très serrés (close-up).
Dans tous ces cas de figure, la garde doit être "raccord", c'est à dire identique sur chaque plan tourné. En outre, le changement de lame doit pouvoir se faire rapidement par un armurier sur le plateau de tournage, c'est pourquoi les éléments de garde sont généralement solidaires les uns des autres, et le serrage de la lame se fait par vis BTR. Ainsi en deux coups de clé Allen, la lame est remplacée, sans avoir perdu un pommeau ou une rondelle au cours de l'opération (c’est l'expérience qui parle...).
En outre, les épées de cinéma sont parfois soumises à de rudes conditions météorologiques. Elles ne doivent pas s'abimer ou tâcher les costumes à cause de leur rouille. C'est là l'avantage des alliages non ferreux, tels que l'AU4G ou l'AG8000® : ils ne rouillent pas. Une légère pellicule d'oxyde d'alumine peut venir recouvrir les lames, mais un coup de scotch brite suffit à leur rendre leur éclat.
Lame acier ou lame alu : faut-il choisir ?
C'est un éternel débat qui anime la communauté de l'escrime artistique en France: faut-il utiliser des épées en aluminium ou en acier ? À la lecture de cet article vous aurez compris que les épées en aluminium sont avant tout des outils conçues spécifiquement pour le cinéma. Ne pas les utiliser face à une caméra gomme inévitablement une partie de leur intérêt. Par ailleurs, il serait faux de dire qu'au cinéma seules les épées en aluminium sont utilisées puisque selon la demande de la mise en scène, les armuriers sont susceptibles de fournir des épées en latex, en résine, en balsa, etc...
Une question aux plus bricoleurs d'entre vous : entre tournevis cruciforme ou plat, en avez-vous choisi un et banni l'autre ? Non, vous devez sans aucun doute avoir les deux dans votre trousse à outils, car leur utilisation dépend des travaux que vous avez à faire. Il en est de même avec les épées en acier ou en aluminium. Les deux sont à avoir dans son sac d'armes, et à utiliser selon les séquences d'action.
Magalie Ressiot, championne du monde d'escrime artistique, a écrit un article au sujet du choix entre lame acier ou lame duraluminium, vous pouvez le consulter en cliquant ici.
Pour les plus scientifiques d'entre vous...
Nous sommes actuellement en train de mener des travaux de recherche avec l'Institut P Prime à l'Université de Poitiers pour comparer les propriétés structurales de l'AG8000® par rapport aux autres alliages d'aluminium, dont l'AU4G. Dès que les résultats seront disponibles, ils seront publiés sur notre blog (Septembre 2021).
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